Gamaran
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.


Entrez dans un univers où l’inimaginable a pris le pouvoir.
 
AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le Deal du moment :
Réassort du coffret Pokémon 151 ...
Voir le deal

 

 Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.

Aller en bas 
4 participants
AuteurMessage
Maître du Jeu
Grand manitou
Grand manitou
Maître du Jeu


Messages : 37
Date d'inscription : 31/05/2018
Age : 104
Localisation : Hors du jeu. Au-dessus de vous.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeSam 25 Aoû - 14:29

Spoiler:

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1535146228-cequelecielnapasvouludire

Le déclin du jour habillait le ciel d’ocre et de grège.  Il trônait au-dessus des hommes un désert de nuages, calme et majestueux, mais au-dessous, le chaos faisait ses œuvres, en s’amusant de la détresse des mortels.


Sous les décombres d’une église abandonnée, à des dizaines de kilomètres des premières masures de la cité de Broadchamber, se tenait un sombre conciliabule. Un homme, coiffé d’une cape mordorée, priait face à un autel de bois, serrant dans sa main un collier de perles noires et répétant sans cesse les mêmes mots, dans le même ordre.

⸺ Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit. Crépuscule. Aube. Jour. Nuit… psalmodiait-il, habité par une entité destructrice.

Un mystérieux petit groupe, composé de six autres personnes, le précédait, en se murmurant des commentaires. Si leur positionnement vis-à-vis du prédicant semblait s’y prêter, ils ne paraissaient pas lui être soumis et complotaient, au contraire, en se servant de ses prêches.

⸺ Combien de temps avant que cela n’aboutisse, semnothée ? demanda l’un des hommes, amusé.

⸺ Cela ne devrait plus durer longtemps, guerroyeur, répondit le druide, en posant chacun de ses termes avec lenteur. Ils connaîtront bientôt l’inversement des cycles.

⸺ Ils ploieront le genou face à notre surpuissance !  S’exclama aussitôt un autre, soufflant tout l’éclat de grandeur. Et, en les armant, nous marcherons sur la cité secondaire.

⸺ Puis sur Previsu. Et enfin, sur la cité principale. Rien, ni personne, ne pourra s’opposer à nous, une fois les cycles inversés, acheva le premier homme à s’être exprimé, comme pour clore la discussion.

Ils s’approchèrent de leur compagnon. De son visage, exsudaient de longues gerbes de sang. Ses yeux, ses narines et sa bouche libéraient un ruisseau rouge, qui venait, par grosses gouttes, s’étaler sur le sol. Il se vidait de sa vie, mais continuait à proclamer les mêmes paroles assassines.

Six mains se posèrent alors sur son dos. Et ils proclamèrent tous les sept, avec une énergie commune, un dernier psaume.

Ô Ciel, ô Terre, ne vous réconciliez plus jamais ! Cette phrase tua le prieur, qui s’effondra dans un dernier appel, en se réjouissant de son sacrifice.

Ils sortirent tous de l’église, et s’éparpillèrent aussitôt.

***

Au petit matin, la cité de Broadchamber se réveilla dans l’horreur.

Un enfant, âgé d’à peine six ans, retrouva sa mère et son père écrasés par des roches célestes, alors qu’ils étaient sortis chercher les premiers laits. Il s’approcha de ses parents, transi d’effroi, mais mû par un réflexe incontrôlé, et regarda autour de lui, pour s’apercevoir du massacre.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1535147192-mortmort

Une pluie de pierre s’était abattue sur la ville, détruisant, avec elle, l’intégralité des toitures de pailles, désagrégeant celles faites de bois, et fragilisant celles faites de roches. Ceux qui étaient faits de chair, par contre, ne furent guère épargnés.

Mais, alors que s’évacuait encore le sang des habitants par les bas-canaux, et que les premiers secours s’évertuaient à sauver les quelques survivants, se dressa un autre problème.

Le sol se mit à fondre. Et, affamé, il commença à dévorer les fondations de toutes les maisons. La ville se remettait à peine des sévices du ciel et de ses rocs assassins, qu’une bourbe vorace envahissait les pavés, déformant petit à petit la topographie de Broadchamber.

Des trombes d’eau s’évadaient de la terre. Les rues bougeaient. Les corps morts étaient engloutis. Les maisons à moitié détruites par la pluie de roche, s’effondraient dans la boue.

C'était un glissement de terrain. Et il était fatal.

Accompagnée par les bruits feutrés de la boue, la ville hurla sa peine haut et fort à travers Gamaran, implorant l’aide des théoriciens et de la couronne.  

***

Dès que la nouvelle fut diffusée à travers le royaume, une large réunion se tint à la cité principale, conciliant chefs de guildes, grands théoriciens et petits seigneurs. Une telle hécatombe ne pouvait rester sans suite. Il appartenait aux habitants de cette île d’éclaircir les causes de cette catastrophe pour ne plus jamais la subir.

La guerre qui sévissait depuis de longues années entre Previsu et la cité secondaire, fut ralentie par la détresse du seigneur de Broadchamber et par les tristes pertes que ces châtiments divins avaient occasionnés. L'expédition prévue par le Roi s'éloignait des idées. Les tensions liées à la guerre semblaient être mises de côté. Cependant, ce n'était qu'une apparence. En effet, loin d’eux étaient encore l’idée de se réconcilier... Cette quête proposée par le roi et par le dirigeant de la cité résidentielle, était finalement le lieu d’un nouvel affrontement.

Rigoristes, évolutionnistes, empiristes, prophétistes et tantristes s’étaient rassemblés dans les appartements du Roi pour y proposer leurs services. Et dans l’adversité, se révélerait le meilleur parti : celui qui élucidera ce problème.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1535199800-expedtion

Tous y voyaient là une occasion de briller et de rassembler de nouveaux fidèles. Aussi, furent envoyés les meilleurs éléments sur place.

***

Les derniers ordres furent donnés. Les enquêteurs s’étaient regroupés autour du maître de quête, un intendant du seigneur de Broadchamber. Ils se tenaient tous, droits comme des piquets, dans le grand château du seigneur, au beau milieu de la cité dévastée, et avaient pu constater amèrement, en arrivant sur les lieux, à quel point ils avaient été mis en branle.


⸺ Aujourd’hui est un jour pourpre, entaché par la mélasse. Nous ne savons absolument rien des causes de cette catastrophe et nous comptons sur les grandes mouvances pour nous éclairer, s’exprima-t-il, d’un ton solennel. En revanche, les conséquences ont été analysés par les rangs du Roi. Quatre-vingts morts, trente-quatre habitations détruites, deux hectares de la ville sont bloqués. Les pluies de roches sont tombées aux premières aurores, à six heures quarante du matin, et les écoulements sont arrivés un quart d’heure après, à six heures cinquante-cinq. Il est quatorze heures. Cela fait donc à peu près 8 heures que les évènements se sont déroulés… Il marqua un silence, peiné par la fatalité des éléments. Prions par que cela soit un accident isolé. Regardez le ciel fréquemment. Et veillez à ne pas vous aventurer dans les zones embourbées.

Sur ces entrefaites, tous les participants se dispersèrent en quête de réponses.

Qu’allaient-ils réelement trouver ? La mort ? La gloire ? La richesse ? Le savoir ? Toutes les mouvances se ressemblaient par la quête, mais pour combien de temps ? Que cachait cette émulation commune ? Où était l'arbre ? Où était la forêt ? Quelles étaient ces sentences célestes ? Quelles étaient ces malédictions marécageuses ?

Des centaines, des milliers, des millions, des milliards... Une infinité d'ombres pour si peu de lumières...

Missionnaires, aventuriers, prosélytes, chaque pas vers la vérité est une distance qui vous éloigne de ce que vous étiez. Il y a, là, un long voyage, et d'interminables sentiers.

Ne vous trompez guère. Ou vous le payerez cher.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler


Dernière édition par Maître du Jeu le Sam 6 Oct - 18:01, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
https://gamaran.forumactif.com
Oron
Chercheuse
Chercheuse
Oron


Messages : 3
Date d'inscription : 16/06/2018

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeLun 17 Sep - 17:56



- CaresseLe, viens.

     A peine l’intendant du seigneur avait-il fini son intervention qu’elle se dirigeait déjà vers la sortie du château suivie de près par une petite bestiole à poils bondissante. La capuche ample qui couvrait sa tête se soulevait sous l’impulsion de ses pas sautillants et désordonnés alors que ses bras se balançaient nonchalamment autour du tissu flottant de sa longue cape. Si sa démarche paraissait guillerette, ses traits étaient pourtant relâchés, lui donnant un air presque délassé. Les deux grands yeux qui ornaient son visage balayaient lentement les alentours entraînant sa tête dans une danse aléatoire.

- Oron ? Tu vas où comme ça ?

     Shoyo Pesquisa, une jeune femme à la posture assurée, avait prononcé ses paroles. Il s’agissait de la cheffe de la guilde des néo-évolutionnistes. Elle regardait son élève, ce petit gnome affublé d’un monceau de tissu blanc, ainsi que son fidèle accompagnateur s’éloigner vers la sortie. Sans se retourner, Oron répondit rapidement et sur un ton monocorde :

- Sur les lieux pour enquêter.

- Lorsque l’on est une équipe, comme c’est le cas pour nous en ce moment-même, il est nécessaire et judicieux de se concerter avant d’agir plutôt que de partir seul sans informer ses coéquipiers. Essaie d’y faire attention. Maintenant que nous avons discuté de cela, dirigeons-nous hors du château comme tu l’as proposé.

     Oron ne répondit rien et s’arrêta alors pour attendre Shoyo afin qu’elles se mettent en route ensemble. Ce genre de situation était monnaie courante entre les deux investigatrices. Oron n’avait que peu de repères sociaux et elle parvenait difficilement à extraire les règles implicites qui sont de mise dans certains contextes, ce qui créait moulte malentendus et différents avec les personnes non averties. Surtout avant l’arrivée de Shoyo dans sa vie. Elle avait été recueillie par cette dernière après bien des difficultés rencontrées sur son chemin vers l’âge adulte. La curiosité dévorante d’Oron, son avidité pour la recherche scientifique dans laquelle elle avait trouvé un cadre structurant ainsi que ses pouvoirs avaient séduit la cheffe de la guilde des néo-évolutionnistes qui s’était décidé à la prendre sous son aile. De toute manière à partir du moment où elle lui avait parlé avec une considération réelle, Shoyo n’avait plus le choix : Oron la suivrait sans répit. Bien qu’elle n’accordait aucune attention ou affection apparente à sa maître, la jeune fille lui vouait une admiration sans faille et lui était dévouée en tant qu’elle estimait Shoyo comme étant la personne qui l’avait sauvée des sables mouvants de sa vie. En retour, celle-ci lui apportait un savoir précieux dans le domaine scientifique et lui servait de guide dans ses interactions sociales. Si elle était parfois lassée des faux pas d’Oron dans ce domaine, elle ne lui en tenait jamais rigueur puisqu’elle avait connu des difficultés similaires. Pour cette raison, elle tâchait toujours de lui prodiguer de précieux conseils lui permettant de comprendre le monde qui l’entoure.

* Fière d’être avec elle pour cette quête. VITEVITEVITEVITEVITE. *, pensa Oron tout en regardant fixement droit devant elle, Shoyo à ses côtés.

     Shoyo avait été contactée par le seigneur de Boradchamber en personne pour tenter de lever le voile sur les mystérieux incidents des jours derniers. C’est en sa qualité de grande théoricienne ainsi que cheffe de la guilde des néo-évolutionnistes que la couronne avait fait appel à elle. Elle n’avait pas hésité une seule seconde à répondre à cette demande. La situation constituait pour elle une occasion certaine de pouvoir compléter ses travaux actuels concernant son fameux codex. Elle cherchait à étudier la nature des pouvoirs de très près, et la catastrophe dont étaient victimes les habitants de Broadchamber s’apparentait pour elle en tous points à une œuvre issue de pouvoirs occultes, mystérieux. Par ailleurs, de par son statut, elle estimait qu’il était de son devoir de mettre ses savoirs et compétences au service de la population. Alors qu’elle quittait Prévisu pour rejoindre Broadchamber, elle s’était aperçue qu’elle était suivie. C’est sans surprise qu’elle découvrit son élève à quelques mètres derrière elle, de sa démarche étrange, les yeux fixés sur un arbre insignifiant, mais pour le moins déterminée.

     Oron avait eu vent de l’appel qu’avait reçu Shoyo et avait tout de suite perçu le même intérêt scientifique qu’elle dans cette quête, bien qu’elle se fichait pour l’instant de la population locale. Elle brûlait d’envie d’observer scrupuleusement chaque parcelle de terrain afin d’en déceler les détails insignifiants qui permettraient d’inférer les causes de l’incident. Elle avait préparé son petit carnet et ses crayons afin de réaliser le plus de croquis possibles, croquis qui pourraient ensuite être insérés dans le codex et servir plus tard. C’est ainsi, sans hésitation aucune, qu’elle avait suivi sa maître sur son chemin vers la quête. Et sans le lui demander bien sûr.

     Shoyo n’avait eu le choix que d’accepter la présence d’Oron, puisqu’elle l’aurait rejointe à Broadchamber en dépit de son interdiction. Puisqu’elle était là, autant multiplier les forces en faisant équipe. Ses capacités pouvaient par ailleurs s’avérer très utiles pour l’expédition. C’est pourquoi, après avoir regardé son élève s’avancer dans la même direction qu’elle, elle s’était simplement retournée en esquissant un sourire tendre et avait continué son chemin.

- Viens, Oron.

     A leur arrivée dans la ville accablée, elles avaient dû traverser la ville dont il ne restait presque plus que des décombres. Des fumées de poussière s’échappaient encore des ruines et filtraient la pâle lumière du soleil du matin. Le silence régnait, après le chaos. Dans cette ambiance désolée, le visage de Shoyo s’était couvert d’un voile de plus en plus grave alors l’impatience d’Oron était devenue palpable. Elle s’agitait au beau milieu des restes cataclysmiques, balançant ses bras d’avant en arrière, ses yeux translucides écarquillés, tels des caméras. Tout ce qui passait au travers de ces cristaux incrustés dans la peau de son visage était enregistré instantanément. Ses sens en éveil, certaines images des décombres s’étaient parfois mélangées à ses souvenirs tragiques du Bandit Trap.

* Poussière. Vois plus. Poussière. Eternue. Crissements dans les gravats. Sombre lumière. Pique les yeux *, telles s’enchaînaient les images dans son esprit.

     Oron n’avait perçu la détresse de la situation qu’au travers de cette association entre les sensations présentes et les images sensorielles qu’elle avait stockées lors de ses précédentes expériences. Chaque parcelle de terrain avait été décortiquée par ses sens surhumains, au point que certains stimuli en étaient devenu dérangeants. Elle avait serré sa cape très fort autour de son corps et de sa tête. Les vagues de chaleur avaient ondulé au travers de son corps, mais il ne lui avait pas été difficile de rester maître de la situation jusqu’au château où son impatience avait atteint son comble.


     Désormais, elle partait de nouveau dans les décombres accompagnée de Shoyo et CaresseLe.

* Observer, hypothèse, capter, enregistrer, chercher, scruter, récolter, disséquer, inférer *

     Tel un jeu de pièces emboitées, tout le protocole mental d’Oron se mettait en place dans son esprit.

Revenir en haut Aller en bas
Jiwa Lys
Éclaireuse
Éclaireuse
Jiwa Lys


Messages : 7
Date d'inscription : 25/06/2018

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeSam 22 Sep - 1:22


Je considère que ce qui arrive à l’humanité est un test. Si celle-ci le réussit, elle survivra. Si elle échoue, l’humanité disparaîtra. Mon avis sur cette question est plutôt pessimiste. Je suis persuadée, malheureusement, que les pouvoirs détruiront les Hommes. Bien qu’ils pourraient être utiles dans beaucoup de situations, je pense qu’il est plus sage de s’en débarrasser. Mon idéal à moi serait de les utiliser qu’en cas de nécessité et d’extrême urgence. Malgré ce que pense mon peuple, je soutiens l’idée qu’un pouvoir magique puisse être utiliser de façon bénéfique. Et bien qu’il interdise formellement l’utilisation des pouvoirs, j’espère un jour le mettre tout de même à profit pour une bonne cause. D’ailleurs, personne ne le sait, mais lorsque je vais en forêt pour participer à la cueillette de la semaine, j’en profite pour m’exercer à maîtriser mon pouvoir.

***

C’est lors d’une matinée à cueillir des plantes médicinales, pendant laquelle je profitais d’être seule pour m’entraîner, que je fis la rencontre d’un groupe de cinq personnes. Trois hommes et deux femmes se trouvaient dans une clairière. Ils avaient l’air d’avoir entre vingt et trente ans. Je n’avais pas l’habitude de rencontrer des êtres humains dans cette partie-là de la forêt. Je suis donc allée à leur rencontre, espérant ne pas trouver des classiques-rigoristes. Je craignais en effet qu’une personne de mon peuple ait compris ce que je faisais en réalité dans la forêt les jours de cueillettes.

Je leur ai demandé qui ils étaient et pourquoi ils se trouvaient là. Leur réponse fût brève : leur groupe s’entraînait à développer leur pouvoir. De cette façon, ils pourraient réagir efficacement en cas de conflits. Ma réaction fût alors de les avertir qu’utiliser des pouvoirs à la limite du territoire des classiques-rigoristes était totalement risqué et qu’il était d’ailleurs interdit d’en faire usage ! Comprenant alors que je faisais partie de ce peuple, les deux filles commencèrent à manipuler leur pouvoir, contre moi. Je ne pus que riposter et je sortis ma flûte à bec que je cachais toujours dans mes bottes.

Alors que les deux femmes se préparaient à déchainer leur pouvoir contre moi, je soufflai dans le bec de la flûte afin d’en sortir un son grave et régulier. J’aperçu leur rictus qui trahissait leur moquerie. Cependant, elles comprirent vite que ma flûte était en fait mon arme. En un souffle, je leur envoyai une tornade de vent qui les déstabilisa. C’est comme ça que ces cinq personnes virent pour la première fois une classique-rigoriste faire usage d’un pouvoir. Ils comprirent que j’étais différente de mon peuple et arrêtèrent de m’attaquer. Après leur avoir expliqué ma situation et mes convictions, je réussis à les convaincre de m’accepter dans leur groupe.

Bien qu’ils se méfiaient les premiers jours, ils ne pouvaient nier la maîtrise que j’avais de mon pouvoir. Je les retrouvais, pendant mes heures de cueillette et chacun apprenait son savoir-faire aux autres. J’appris en outre que les deux femmes qui m’avaient attaqué venaient d’un village empiriste. Deux des hommes étaient frères et appartenaient à une famille évolutionniste. Quant au dernier, le plus âgé, il était prophétiste.

Une après-midi où j’allais rejoindre mes cinq nouveaux associés, j’entendis tous les villageois parler d’un massacre, d’une ville détruite par une catastrophe naturelle. Lorsque je croisai ma mère, celle-ci me raconta les évènements, affolée : ce matin, la ville de Broadchamber avait été démolie par des jets de pierre et des écoulements. Une partie de ma famille vivait là-bas.

Quatre-vingts personnes avaient succombé, mais on ne les avait pas encore identifiées. Tout le village était agité, chacun essayait de trouver une raison à ce massacre et tentait d’élucider le mystère. Je pus sans difficulté retrouver les autres membres du groupe pour leur faire part de la nouvelle. Il fallait aider ce village et résoudre le problème, telle était notre mission après tout ! Le prophétiste n’était pas d’accord. Une catastrophe naturelle n’arrivait jamais par hasard selon lui. Et puis, qu’est-ce qu’on pouvait bien y faire ? Personne ne peut rien contre la nature. Les autres, heureusement, me soutenaient. C’était là une occasion de mettre à l’épreuve nos efforts et de mettre à profit nos pouvoirs pour une cause utile et intelligente.

C’est ainsi que quelques heures plus tard, nous nous rendions dans les appartements du roi afin de proposer nos services. Malheureusement, nous ne pouvions agir en équipe alors que nous ne venions pas des mêmes factions. Nous devions donc nous séparer le temps de cette quête, pour ne pas réveiller le courroux des chefs de guilde. Il fallait donc que chacun soit représentant de sa propre faction, c'était une condition très importante pour tous les mouvements. Par ailleurs, les classiques-rigoristes étaient peu appréciés. Ce n’est qu’après avoir prouvé au chef de quête la qualité de mon pouvoir et avoir longuement exposé les motifs de ma candidature que je fus acceptée comme enquêtrice.  

***

Me voilà donc à Broadchamber, face au carnage que la ville et ses habitants ont subi ce matin même. Je n’en crois pas mes yeux. La ville où je rendais visite à mes grands-parents depuis mon enfance, n’était pas reconnaissable. La moitié de la ville était détruite, totalement dévastée par les écoulements et les pierres, tombées de nulle part. Quant à la seconde partie de la ville, elle tenait à peine debout. Je ne m’attendais pas à ça, pas à autant de destruction.

Je ne pus m’empêcher de rester bloquée de stupéfaction. Pendant ce qui m’a semblé être des heures, mais qui n’étaient en fait que quelques secondes, je ressentis à la fois un choc, mais aussi de la tristesse et de la colère. Cela créait en moi un vide intérieur et en même temps un véritable bouillonnement. Il fallait que je me ressaisisse, absolument, sans quoi j’allais faire regretter au chef de quête de m’avoir accepté. Il fallait que je trouve des indices, que j’établisse des théories. Il y avait bien une explication à tout cela ! En tout cas, il fallait absolument empêcher qu’un autre massacre de ce genre survienne. En approchant des habitations, un sentiment étrange m’envahit. J’avais la sévère impression que cette matinée avait été le commencement de quelque chose d’anormale, comme une punition sur l’humanité.
Revenir en haut Aller en bas
Leeroy Strauss
Guerrier fanatique
Guerrier fanatique
Leeroy Strauss


Messages : 6
Date d'inscription : 16/06/2018

Statistiques du personnage
Nature du pouvoir: Hell Blaze
Nature de la maîtrise: XXX
Inventaire:

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeSam 29 Sep - 20:12



Pavupapri. Quartier d'Ivreville, ma foi bien vivant. S'il vous prenait l'envie de vous balader au lever du soleil, profitant de la rosée du matin et sa légère brise rafraîchissante, vous ne le feriez sans doute pas ici. En omettant l'étouffante chaleur qui règne dès les premiers rayons ainsi que les ruelles poussiéreuses et desséchées, rien que la densité d'ivrognes mal-en-point au kilomètre carré rend le séjour facilement désagréable. Je ne mentionne même pas l'odeur. Entre les galettes déposées entre deux caisses et les litres d'urine alcoolisée déversés chaque nuit, il y a de quoi faire. C'est pourquoi, pour dormir, je privilégie les toitures. À défaut d'être confortables, elles sont assez peu fréquentées et restent donc propres. Ce matin, les premières lueurs me réveillent, comme à l'accoutumée. Du moins, je vogue entre rêve et réalité durant quelques heures... Si j'ouvre les yeux, j'ai la vue sur tout le quartier, jusqu'à la sortie de la ville qui donne sur le désert. Des groupes de lascars à tous les coins de rue, des bagarres par-ci, une course-poursuite par-là, rien d'inhabituel quoi.

Ce qui l'est bien plus, en revanche, c'est cet étrange type qui déambule en marchant lentement, bouche-bée, les yeux ébahis. On croirait qu'il est mort tant son regard est vitreux, avec sa salive moussante qui déborde au coin des lèvres. Sa démarche de zombie n'est pas pour arranger les choses. Et encore, jusque là, la situation n'a rien d'exceptionnel pour un matin à Pavupapri. C'est lorsqu'il prend une grande inspiration avant de s'égosiller de toutes ses forces que ça devient intéressant.

- LA FIN DU MONDE ! LA FIN DU MOOOOOOOOOOOONDE !

Whut ?! D'un sursaut, je reprends pleinement conscience. J'ai l'habitude d'être réveillé de force, mais j'aurais bien voulu rester semi-endormi encore un petit peu... Après un long bâillement me faisant monter les larmes, je m'étire les bras et les jambes avant de m'essuyer les yeux. Je ramasse les quelques affaires en ma possession, qui se trouvent être un sabre et un simple maillot, que j'enfile d'ailleurs après l'avoir secoué afin de le dépoussiérer. Par curiosité, je m'approche du soulard qui en remet une avec sa gueulante.

- LA FIIIIIIN DU MOOOOOOOOOOOONDE ! LA FIIIIIIIIN DU MOOOOOOO/ZBEM/

J'ai eu la patience hein, mais quelqu'un d'autre a décidé de lui jeter sa flasque de whisky encore presque entière et a réussi à lui encocher la mâchoire. Le vieux débris continue alors sa route, de sa démarche toujours aussi cadavérique. L'observant depuis mon toit, je le laisse marcher quelques pas avant de me laisser tomber dans le vide lorsqu'il arrive à ma hauteur. J'atterris avec souplesse et légèreté en lui rasant le bout du nez. Effet de surprise garanti. Il recule d'un pas d'appréhension, mais son visage est déjà si crispé par l'angoisse qu'il ne semble plus craindre la mort ni quoi que ce soit d'autre. Cela m'intrigue. J'aimerais savoir ce qu'il en retourne. Est-ce simplement un vieux fou comme tant d'autres ? Généralement, on ne fait pas de vieux os dans cette région de Gamaran, alors peut-être vient-il d'ailleurs ? Il n'y a qu'une seule manière de le savoir.

Je me retrouve donc face à lui. Là, je remarque un pendentif en forme du symbole sataniste. Du haut de mon mètre-cinquante, je penche la tête légèrement en arrière afin d'avoir le visage droit sur le sien. Tout de noir vêtu, j'ai presque l'air d'un gamin déguisé en ninja... Je me doute néanmoins que mon apparence n'importe que très peu à mon interlocuteur. J'en viens donc directement à l'essentiel.

- De quoi parles-tu, vieillard ?

- Des pierres... Grandes de huit pieds ! Il en pleuvait ! Par dizaines !

Il se jette alors à mes pieds, sur les genoux. Me tirant par le pantalon, il semble jeter son désespoir sur moi. Il balbutie d'inaudibles inepties en s'agitant dans tous les sens. Je ressens à travers ses mimiques et le ton de sa voix qu'il n'est plus tout à fait en vie. Je peux toutefois tenter de glaner quelques informations.

- Où ça ? Comment cela a-t-il pu arriver ?

- L'humanité est perdue ! La colère du Démon s'abattra sur ce monde profane ! Et cela a commencé cette nuit : des roches titanesques ont dévasté tout un village en quelques minutes. La ville de Roadchamber n'est plus. Et il n'en restera pas plus du reste de Gamaran.

Le vieil homme tire à nouveau sur mes vêtements afin de me rapprocher de lui. Se laissant crouler au sol, il use de ses dernières forces afin de dresser son visage dans ma direction, tandis que je m'accroupi afin de l'écouter.

- La fin du monde... La... fin...

Son dernier souffle emporta la suite de sa phrase. J'ai toutefois eu ce que je voulais. D'un geste détaché, je relâche le vioc dont le corps engourdi termine de s'affaler sur le sol. Si on m'avait dit hier soir en me couchant que j'allais être réveiller par un étrange vieil homme et qu'il allait me mourir dans les bras, je n'y aurais jamais cru. Je regarde ce qui reste de son enveloppe physique en soupirant, puis me relève. Tant pis ! Les mains sur les hanches, je regarde à gauche, puis à droite. Personne ne m'a vu. Il est grand temps de disparaître !

D'après la position du soleil dans le ciel, il ne devrait pas tarder à être midi. D'après les bruits sourds qui émanent de mon estomac également. Je pars donc en quête d'un commerce dans lequel je pourrais me sustenter. Le regard fixe, je marche sans me soucier des loubards qui rôdent, m'estimant en sécurité de par mes capacités. Je préfère me donner des airs de caïd car je sais que mon allure d'enfant n'intimide personne au premier abord. Je sais néanmoins donner une lueur suffisamment assoiffée de sang à mon regard pour en faire frissonner plus d'un. Je repense soudain au pendentif du vieillard. Était-ce un sataniste ? Venait-il du royaume ? Il n'avait pas l'air d'ici. Que faisait-il donc là ? Quoi qu'il en soit, son histoire a attisé ma curiosité. Bien que j'adhère à la maison sataniste, j'ai ma propre interprétation de la théorie. Je pense que l'utilisation irréfléchie des pouvoirs apportera la misère et la destruction sur Gamaran. Toutefois, ce chaos sera apporté selon moi par les Hommes eux-mêmes, et non pas une divinité maléfique qui détruirait pour compenser le déséquilibre causé par les pouvoirs. J'ai donc du mal à voir la destruction de Roadchamber autrement que comme un acte de la main de l'Homme.

Il existerait donc des gens terriblement dangereux, capables d'une telle prouesse aussi sanglante soit-elle. Cette nouvelle me fait légèrement froid dans le dos. Je n'ose même pas imaginer leur identité, ni même quel peut être leur but. Tout à coup, un souvenir me survient : j'avais rendez-vous avec les autres commandants de la guilde ce matin. Et moi, pendant ce temps, je joue les croque-morts et psychote à propos d'un hypothétique groupe dangereux dont l'existence n'est même pas avérée. Mince, ils vont encore me prendre la tête...

---

Me voilà arrivé à notre point de rendez-vous. Une oasis proche d'Ivreville, toutefois difficile d'accès tant sa faune et les conditions du désert avoisinant sont extrêmes. J'y vois Sheitan assis en tailleur sur une pile de rochers, à l'ombre d'un cactus gigantesque, dépassant les dix mètres. Arrivant depuis son dos, je m'approche silencieusement afin de ne pas subir son regard accusateur avant d'entamer la discussion. Les mains dans les poches, je m'arrête à quelques mètres derrière lui en me tenant droit comme un I. Un sourcil relevé et la moue désinvolte, j'essaie de paraître naturel et non pas gêné d'avoir manqué le RDV.


- Yo, dis-je d'un ton détaché.

- ..., daigne-t-il répondre.

Aaaah, Sheitan. Le commandant en chef de la guilde sataniste, également bras droit du leader. Toujours aussi lourd ! Il fait tout le temps la gueule. Je déteste quand on fait des manières pour rien. Impossible de discuter avec quelqu'un qui râle à propos d'absolument tout et n'importe quoi. On pourrait tout simplement discuter de ce dont il avait à me parler durant la réunion, plutôt que de bouder. Est-ce vraiment digne d'un commandant en chef ? Le voilà qui tourne doucement la tête dans ma direction avec de m'apercevoir. Soudain, il se déplace à très grande vitesse afin de bondir sur moi en arrivant par ma gauche, sabre en main dégainé et prêt à fendre l'air ainsi que tout ce qui se trouvera en face de lui. Il tranche donc d'un revers du bras droit, d'un slash horizontal. Sur mes gardes, j'ai à peine le temps de dégainer mon sabre et de le mettre en opposition. Les deux armes appuyées l'une contre l'autre laissent entendre des crissements métalliques qui viennent rompre le silence pesant des lieux. Nos regards pénétrants se fixent mutuellement. Je sens sa colère bouillonner. Je l'ai irrité tant que ça ?

- C'est comme ça que tu dis bonjour à tes collègues ?

- Tu as une heure et demi de retard, c'est inadmissible. Nous autres commandants avons du pain sur la planche, tu sembles être le seul à ne pas prendre ta fonction au sérieux.

D'une impulsion contre mon sabre, il me repousse légèrement en arrière avant de reprendre de bons appuis. Je me réceptionne quasi-instantanément en reculant d'un pas et me mets en position. Je sens qu'il n'en a pas fini.

- Je ne comprends absolument pas pourquoi Maître Malvicious t'accorde cette position de commandant. Tu n'es qu'un petit impertinent qui ne mesure pas la portée de ses paroles.

- J'imagine que ça ne doit pas être facile à comprendre pour un esprit aussi simple que le tien, réplique-je en haussant les épaules.

- Qu'est-ce que je disais..., rétorque-t-il en empoignant plus fermement son sabre.

Un petit sourire vient étirer le coin de mes lèvres. Cette situation n'a rien de surprenant, mais elle a l'effet d'un petit cadeau inattendu. Des frissons me grimpent alors le long de la colonne vertébrale. Affronter Sheitan ici et maintenant pourrait être problématique pour mes projets, notamment celui de vivre au moins 15 ans de plus. Mais il pourrait m'apporter une certaine expérience... Le voilà qui relance de multiples assauts. Laissant mon instinct se charger de tout, je repousse chacune de ses attaques, dosant avec dextérité la force et la précision de tous mes mouvements. Si ses premiers coups me surprennent à peu près, ils deviennent très vite faciles à contrer. Il s'arrête tout à coup.

- Utiliser mes pouvoirs contre toi serait une violation de ma foi. Je t'accorde donc le droit de vivre... Pour cette fois-ci. Tu as au moins le mérite de ne pas te laisser tuer par n'importe qui. Il rengaine son arme en me regardant avec toujours autant de condescendance. Maître Malvicious est en déplacement, aussi cette réunion avait pour but de vous adresser certaines directives. Tu n'étais cependant pas concerné, ton absence ne nous a donc guère dérangés. Tâche néanmoins d'éloigner les hommes de ton unité proches de Roadchamber. Il vaudrait mieux pour nous d'éviter d'y être vus. Compris ?

Roadchamber ? Tiens donc... Cette ville qui fut ravagée par une attaque mystique durant la nuit. Coïncidence ? J'en doute. Mais alors, quel est le rapport avec la guilde ? Pour quelles raisons devrions-nous nous en tenir écartés ? Va savoir... Feignant la crédulité et la désinvolture comme à mon accoutumée, j'hausse les épaules en acquiesçant, avant de prendre congé. À bas les formalités avec cet enculé : on se sépare alors sans même se dire au revoir.

Et avec tout ça, je n'ai toujours pas mangé ! Je retourne donc en quête de nourriture en repensant à tout ça. Un village détruit, des fanatiques qui croient voir un signe de la fin du monde, les satanistes qui ne doivent pas être associés à cet événement... Y'a comme qui dirait anguille sous roche. Sur le plan politique, rien n'est plus profitable pour la guilde tant que l'origine humaine de cette attaque n'est pas avérée. Malvis serait-il de mèche ? Ou bien est-ce simplement une opportunité qu'il tente de saisir ? J'ai besoin de savoir. Si Sheitan a foi profondément en sa divinité sataniste et suit aveuglément Malvis qu'il considère comme son intermédiaire avec notre monde - à l'instar d'une bonne partie de la guilde, je crains néanmoins que Malvicious ne joue un double jeu. Je suis du genre à douter de tout, même de mes supérieurs. Les satanistes sensibilisent bel et bien la population autour de l'usage irréfléchi des pouvoirs, toutefois, je ne peux accorder totalement ma confiance à un homme aussi mystérieux.

De toute façon, même si je le souhaitais, j'en serais incapable. C'est plus fort que moi : tout ce qui est relatif à mon maître de guilde provoque en moi une série de doutes. Je me sens obligé de fouiner, chercher la vérité où elle se trouve. Et pour l'heure, elle se trouve certainement aux abords de Roadchamber, si les responsables ne se sont pas totalement volatilisés. Après m'être bien rempli la pense et avoir effectué quelques préparatifs, je mets donc le cap sur cette contrée au sud du pays. Mon enquête ne portera peut-être jamais ses fruits, Malvicious n'a peut-être même rien à voir avec tout ça, mais je me dois de lever le mystère et ce, dans le plus grand des secrets.

---

...
Revenir en haut Aller en bas
Maître du Jeu
Grand manitou
Grand manitou
Maître du Jeu


Messages : 37
Date d'inscription : 31/05/2018
Age : 104
Localisation : Hors du jeu. Au-dessus de vous.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeSam 6 Oct - 23:09

Spoiler:

Portée par une foule grouillante, chérie par ses administrés, une ville paraît devenir quelqu’un. Comme un enfant, on la voit grandir, s’éduquer, côtoyer ses gens, développer ses habitudes, alimenter tout un système de valeur qu’elle finira par adopter… Tout cela n’est qu’une fade illusion.

Les villes ne sont seulement que des vergers de pierre. Et penser qu’elles ont une âme a, sans doute, été le premier fourvoiement des hommes modernes, car en basant leurs existences entières sur ce que la cité avait à leur offrir, ils ont finalement oublié de s’ouvrir à ce que la nature pouvait leur donner.

Toutefois, si par définition la nature avait tant à donner, elle avait également beaucoup à reprendre. Et pendant des siècles, les êtres humains et leur outrecuidance, se sont évertués à l’oublier. Ce fut là leur seconde erreur.

Dédaigner la nature et ne pas penser aux conséquences devinrent ainsi les fondements principaux des civilisations actuelles.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538780212-separation

La ville de Broadchamber n’était pas une cité à proprement parler, mais elle était, depuis toujours, considérée comme le foyer saint de Gamaran. Elle demeurait, aux yeux de tous, un lieu hors des conflits armés et des luttes politiques où la seule règle était celle de la bienséance. Et sur la base de cette puissante réputation, on se surprenait même à la surnommer la « Cité résidentielle » dans le jargon quotidien.

Bâtie sur les ordres de la sixième reine de Gamaran, Lady Allister, en réponse aux hautes instances de la Cité principale qui lui reprochaient sa misanthropie, il y a de cela plus de 80 ans, Broadchamber fut fondée sur le principe de l’accueil inconditionnel. Elle ne fut, à vrai dire, destinée qu’à cela : abriter un maximum de familles et leur fournir un cadre de vie acceptable.

En effet, obsédée par l’édification d’une telle promesse et bien déterminée à laver l’affront qui lui avait été fait à la cour, Lady Allister refusa tout contact avec le roi tant que la ville n’eût pas été entièrement érigée. Ainsi poussée par les caprices d’une reine en mal de reconnaissance, elle fut construite en moins d’un mois.

Ce qui était, initialement, un puit, où venaient s’abreuver les troupeaux, se transforma soudainement en une ville de plus de 40 kilomètres de diamètre.

Les réactions de la cour furent, évidemment, un silence d’approbation.

Face à l’efficacité d’un tel tour de force, comment en aurait-il pu être autrement, après tout ? Avec l'initiative de cette ville et l’élan de paix sociale que cela avait engendré, la reine finissait d’asseoir sa domination sur les terres habitables. Chaque jour, les habitants de toute l’île accourraient aux portes du château pour lui proclamer leur admiration et chaque jour, elle se montrait, aux fenêtres, en les saluant de la main droite.

Lady Allister gouvernait une main de fer dans un gant de velours, et son mari, fou amoureux, n’avait finalement de roi que l’habit.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538781273-ladyallister

Si l’objectif principal était de répandre une image de bienfaitrice à travers le pays et de soumettre de façon de définitive les bureaucrates rebelles, rassembler une telle frange de la population dans des enceintes fermées était tout autant un moyen de les contrôler, de les recenser et de les manipuler.

Vivre ensemble permettait de créer un sentiment de cohésion générale, auquel les gens devenaient de plus en plus attachés, tant et si bien qu’ils finissaient même par se référer à cela en toute occasion. La tradition à Broadchamber était d’aider son voisin sans calcul, de porter ses courges et ses citrouilles à l’approche de l’hiver, de tirer son âne à la fin de l’été, et de garder ses enfants au printemps. L'entraide y était un acte quotidien.


Mais aujourd’hui… ces décennies de paix et de prospérité s’effondraient et Lady Allister, qui avait tant donné pour que ces décennies finissent par devenir des siècles, devait se retourner dans sa tombe.

Des blessés et des ruines, des masures détruites et des familles éparpillées… Broadchamber n’était à présent plus que cela. Ce qu’il restait de vivant ici, n’était sans doute plus que des cris de peur et de douleur qui tintamarraient entre le serpentement maladroit des décombres.

Toutes ces années passées à observer les conflits armés et les luttes politiques d’un œil extérieur et distancié, avaient finalement réussies à détourner leur attention de l’essentiel. Le ciel était capricieux et il n’appréciait, visiblement, pas quand on lui tournait le dos trop longtemps.  

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538780212-separation

Une demi-heure s’était maintenant écoulée depuis la fin de la réunion d’urgence. Le discours de clôture du délégué de secours avait éveillé une émulation générale et en bons réceptacles, les enquêteurs s’étaient répandus, comme une nuée diffuse, aux quatre coins de la ville, l’esprit transporté d’entrain.

S’ils étaient tous déjà dispersés en fonction de leurs rôles et de leurs affiliations partisanes, c’était surtout à leur manière de procéder qu’on différenciait les factionnaires. Quand les plus sécuritaires, les rigoristes et les tantristes, s’aventuraient dans les zones de soin pour interroger les miraculés, les plus téméraires, les néo-évolutionnistes et les empiristes, allaient au-devant du danger pour enquêter sur place.

Shoyo Pesquissa et son apprentie, Oron Whiltyer s’introduisaient, en ce moment, dans les parties nord-ouest de la ville, pour arpenter les espaces sinistrés. Jouant de ses prérogatives de chef des opérations, la magistère avait, dès lors, attribué les rôles à ses sous-fifres : les deux chercheurs quadriviumistes se devaient d’inspecter les ruines et de procéder à quelques prélèvements, la géologue, quant à elle, d’analyser la nature des roches qui avaient chues, et l’apprentie de Shoyo, Oron, avait pour mission de s’aventurer dans les zones les plus accidentées, d’observer les scènes de les dessiner parfaitement pour les retransmettre…

En se plaçant au centre de toutes ces informations et grâce à son pouvoir d’organisation mentale, la grande théoricienne était en mesure de parvenir à des conclusions efficaces. Mais, malheureusement, elle ne pouvait pas inventer les faits, et était ainsi totalement dépendante du travail de ses subalternes pour pouvoir avancer. Consciente de cela, elle avait choisi les meilleurs, les plus opérationnels, les plus vifs d’esprit, et ne doutait pas une seule seconde du pragmatisme avec lequel ils allaient exécuter leurs tâches.

Au moment de les assigner définitivement, elle prit les épaules de sa pouliche et approcha son visage près du sien. Son regard, hanté par des lueurs fantomatiques, évoquait celui d’une véritable psychopathe.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538818479-shoyo

⸺ Oron, écoute bien ce que tu dois faire, proclama Shoyo, d’un ton impérieux. Grimpe jusqu’au sommet des décombres et dessine-moi une vue panoramique du désastre, puis repère les trois zones les plus coulées et rend-toi y pour les explorer. Je ne veux pas que tu loupes ne serait-ce qu'un seul détail. Du bout de son doigt, elle montra le squelette encore fumant d’une grande bâtisse située à quelques dizaines de mètres de leur position. Les ordres étaient on ne peut plus clairs. Tu ne devrais pas avoir de difficultés à situer les zones, en revanche, l’accès au perchoir est assez périlleux. Je t’ai justement choisie pour cette tâche parce que j’estime que tu es la plus en mesure d’y parvenir. Son timbre se relâcha de quelques octaves. C’est ici que tu dois te rentre en premier lieu. Je compte sur toi, chère élève. Quand tu en auras fini avec tout cela, viens me retrouver à notre base au nord-est.


Surplombant l’hécatombe de sa fragile stature, cette tour en ruine ne tenait à peine que sur quelques pierres fissurées. Son escalade était, à n'en pas douter, une véritable opération stratégique. Ce bâtiment semblait être à la base une chaumière de trois étages, larges d’à peine de 30 mètres carré, et accueillait, sur son toit, un pigeonnier ainsi qu’un poste d’observation.

Les éboulements avaient transpercé, dans une explosion surpuissante, le sol de tous les étages, et avaient totalement détruit la vigie. Seuls restaient encore les murs, soutenus les uns par les autres, et une très mince corniche sur la cîme de la maison.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538824666-ruinasse

Au premier étage, les murs semblaient s’être affaissés dans la boue et la structure de l’édifice tout entier en subissait les tragiques conséquences. Il penchait sur le côté et cela n’était visiblement qu’une question de temps avant qu’il s’effondre.

Le deuxième étage et le troisième étage, tous dépourvus de sol, se présentaient comme des énigmes d’escalade. Il manquait un pan de mur à chaque niveau : le second étage était dépourvu du pan est et le troisième étage était dépourvu du pan ouest, tandis que l’accès à la corniche qui menait à la toiture se situait sur la partie est de la charpente qui surplombait le troisième étage.

Les possibilités d’ascension étaient multiples, certes, mais certaines étaient risquées, et les prises les plus évidentes paraissaient être également les plus fragiles. Un faux mouvement ou une hésitation trop longue et la tour pouvait s’écrouler.

Les minutes étaient ainsi précieuses et il coûtait de les gaspiller. Oron devait se dépêcher de trouver un moyen sécurisé pour parvenir jusqu'aux restes du pigeonnier, observer la vue depuis les hauteurs, faire une description de ce qu'elle y voyait et repérer des zones embourbées à inspecter.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538780212-separation

À des lieues de la catastrophe, les rigoristes s’étaient mis en mouvement, avec une synchronicité militaire. Dès la fin de la réunion, les enquêteurs de la Cité secondaire avaient reçu l’ordre, par les hauts-hérauts, de se disperser en éventail sur le coin sud-est de la ville et parvenir jusqu’aux zones de soin avant les tantristes.

Leur but était de recueillir des témoignages et de les recueillir au plus vite. Si la résolution de cette enquête était, pour certains factionnaires, un acte de bonne foi, un geste de bienveillance, les dirigeants de la guilde rigoriste voyait cela comme une course, comme un défi qu’ils devaient absolument relever. À cet effet, la plupart ne cherchaient pas à venir en aide aux victimes, considérant cela comme une perte de temps, et s’appliquaient à glaner méthodiquement les bonnes informations en interrogeant les bonnes personnes.

Tout n’était, finalement, qu’une question de rendement. C’était, en tout cas, ce que la vision des deux frères Wang, maîtres rigoristes, et de beaucoup d’autres hauts-placés, semblait dégager.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538843631-rigoristes

⸺ Reprenons, si vous le voulez bien. Nom ? demanda sèchement Goji, le plus grand de la fratrie, en tenant son calepin et sa plume. Ses mèches d’ébène tombaient sur son regard, et en cachaient tout le mépris. Sans doute en profitait-il pour le faire avec encore plus d’impunité.

⸺ Lloras… répondit le vieillard qui leur faisait face. Allongé sur une couche de fortune, il serrait ses draps avec une crispation non-dissimulée. L’acharnement des enquêteurs le tendait et en descendant du regard, on pouvait s’apercevoir qu’une jambe lui manquait. Monseigneur, je vous ai déjà dit que je n’avais pas de nom de famille… J’ai fait le choix de ne plus en porter à la mort de mes parents… Il s’arrêta de parler et poussa un gémissement de douleur. Pouvez-vous appeler l’infirmière, s’il-vous-plaît ? J’ai besoin d’hydromel…

⸺ Pouvez-vous nous décrire ce que vous faisiez avant les premières pluies de roches ? questionna l’enquêteur, indifférent à la souffrance du vieux Lloras.

⸺ Je ne peux plus vous répondre, Monseigneur. Pardonnez-moi… soufflota fébrilement le survivant. Je suis bien incapable de me concentrer sur ce que je dis…

Tout-à-coup, une main puissante agrippa le col du sinistré et le souleva à un mètre au-dessus du sol. Gijo, le petit frère, beaucoup plus impétueux que son aîné, n’appréciait pas les niaiseries, et pour lui, tous les moyens étaient bons pour parvenir à ses fins.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538850327-gijo

⸺ Ecoute-moi bien, vieille branche, déclara Gijo pour poser les bases. C’est pourtant très simple. Si tu ne réponds pas à nos questions, on t’ampute l’autre jambe. Un sourire carnassier dévorait ses joues et ses yeux se plissaient, en cherchant un signe d'approbation dans le regard de son frère, Goji. Il ne jetait même pas un coup d'oeil à la personne qu'il violentait. On n’a pas de temps à perdre avec des charognes comme toi.

Le visage apeuré du vieillard se tordit d’effroi. Son corps émacié pendait au bras de l’enquêteur. Ce qui paraissait être, au départ, de simples questions sécuritaires, devenait un interrogatoire de plus en plus musclé. Cette journée devait vraiment lui sembler être un aperçu des enfers.

Alors qu’il tentait de desserrer la poigne de son agresseur à l’aide de ses mains fragiles, sa tête se tournait frénétiquement de gauche à droite. Il cherchait en vain un soutien quelque part, espérant que quelqu’un vienne s’insurger de cette infâme situation. La panique gagnait du terrain et sa vision n’allait pas tarder à se troubler, mais dans un moment de grâce, offert par la miséricorde, son regard se posa inopinément sur une silhouette féminine qui commençait à poindre au loin.

Au stade où il en était, il ne lui en fallait pas plus.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538850076-lloras

⸺ EH ! TOI ! JEUNE FILLE ! LA-BAS ! AU SECOURS ! VIENS M’AIDER, JE T’EN SUPPLIE ! hurla-t-il, en priant intérieurement pour que ses paroles atteignent l’intéressée. Il avait tenté le tout pour le tout.

La couche du vieillard était située en bout de campement. On y rangeait les cas les plus désespérés pour ne pas encombrer les allées et venues des médecins entre les couches viables.

Malgré l’immensité du boulevard sur lequel se tenaient ces événements, peu de gens passaient par ici. C’était une aubaine pour ce vieux monsieur que la jeune Jiwa Lys soit là au moment fatidique. Elle ne pouvait pas louper cette scène. Elle s’offrait à elle.

Les deux frères se tournèrent vers l’éclaireuse alpaguée, et Goji, l’aîné, s’avança de trois pas dans sa direction.

⸺ Éclaireuse Lys, entama-t-il, d’une solennité imperturbable. Hiérarchiquement, il était son supérieur et s’ils ne s’étaient pas parlé jusqu’à présent, il savait parfaitement qui elle était et quelle place elle occupait dans l’échiquier. C’est donc assuré du même dédain qu’à l’accoutumée, qu’il continua en expliquant qu’elle n’avait pas à se mêler de ce qui était en train de se passer sous ses yeux. Nous nous occupons actuellement de la zone reculée. Ayez donc l’obligeance de vous diriger vers des couches plus actives, s’il-vous-plaît.

⸺ Circulez, y'a rien à voir ! ajouta son idiot de frère.

Allait-elle affronter ses supérieurs et secourir le vieil homme ? Si oui, comment allait-elle faire ? Si non, allait-elle tracer son chemin, éviter le conflit et vaquer à ses occupations ou allait-elle, carrément, les aider à le maltraiter ? Chaque possibilité offrait ses avantages et ses inconvénients. Elle devait faire son choix.

Les cartes étaient entre les mains de la musicienne.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538780212-separation

Les choses bougeaient énormément autour Broadchamber. C’était peu de le dire.

Que ce soit pour y rentrer ou pour en sortir, les gens se bousculaient aux bordures de la ville, et en venaient parfois aux mains. La cité de l’entraide montrait finalement son vrai visage : celui du survivant, juché du bout du pied sur la dépouille de son voisin.  


Éventrant les portes principales avec régence, les troupes royales, rangées par unités de 30 cavaliers, étaient de celles qu’il ne fallait pas surtout pas encombrer. Elles effectuaient de très longs voyages et le comportement des soldats en subissait les conséquences de plein fouet. Il était fréquent que des lignes de cavalerie renversent un étalage de soin, sans que cela ne soit notifié, ou que des officiers lacèrent des importuns, se dressant, consciemment ou non, sur leur passage.

N’étant plus mère de sûreté, la patience leur était dès lors une marâtre insupportable. À Broadchamber, sur les grandes routes, ou devant les remparts, attendre ne serait-ce une seconde signifiait perdre une opportunité de sauver mille vies. C’était, en l’honneur de ce principe vertueux, qu’ils se permettaient de détruire, d’insulter, voire de tuer.

Le régiment principal de la couronne, composé de 50 soldats d’élite, affecté aux quatre coins de la ville, attendait patiemment les retours d’un informateur envoyé par la couronne. Harold Redhead, commandant en chef des investigateurs royaux, avait confié à son élément le plus rapide, Sven Ironsides, surnommé la « frégate », une mission de la plus haute importance : assurer la liaison entre la Cité principale et les unités dépêchés sur le terrain.

Doté du pouvoir de super-célérité, Sven Ironsides était considéré, à juste titre, comme l’homme le plus vif de l’armée royale. Engagé initialement comme un soldat de première ligne, il se démarqua dès la première campagne d’intervention, en distançant de très loin les formations à cheval lors de la charge, alors qu’il était à pied.

À partir de ce jour, il ne combattit plus jamais sur le champ de bataille. Il fut embauché par le Roi lui-même pour porter ses messages et exécuter les missions nécessitant une véritable vitesse d’exécution.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538857119-sven

Il était réputé pour traverser la largeur de l’île, soit plusieurs centaines de milliers de kilomètres, en seulement une heure et demie. Mais plus que pour sa vitesse, on connaissait Sven pour sa grimace prédatrice, qui, comme un dessin indélébile, ne semblait jamais quitter son visage.

Laissant une large traînée de poussière derrière lui, il s’approchait de la Cité résidentielle à grand pas. Étrangement, il semblait venir du nord et non de l’ouest, la direction de la capitale. Au nord de Broadchamber, il n’y avait, à vrai dire, que quelques fermes, le Désert Igöl et… Ivreville.  

Se dirigeant à toute vitesse sur la ville en empruntant l’escarpement d’une route à une seule voie, il aperçut petit à petit le dos d’un homme qui marchait le long de son chemin, entravant ainsi son passage.

Il avait reçu un ordre très clair : mieux valait détruire les obstacles, quels qu’ils soient, plutôt que de freiner, et il n’avait aucune envie d’avertir l’homme qui était en face de lui. Il dégaina un sabre, dans sa course effrénée, et le tint face à lui, l'axe de la perpendiculaire à son corps et parallèle au sol.

Son dessein était explicite : il voulait le découper. Après tout, il avait tellement l’habitude d’affronter les premières lignes ennemies, qu’un homme ou une centaine étaient, pour lui, un simple obstacle qu’il fallait défoncer. Et puis à la vitesse à laquelle il était lancé, toute la démultiplication de sa masse pesait sur le sabre et une roche aurait été sciée comme du beurre.

Seuls quelques bandits arpentaient ce sillon étroit. Son cadavre allait sans doute faire le bonheur des détrousseurs.

Et alors qu’une dizaine de mètres les séparaient désormais, il exulta :

⸺ Au nom de la couronne… DÉGAGE ! fit-il, en assénant un violent coup d'épée circulaire de droite à gauche, projeté à la vitesse du son et couvrant toute l'horizontalité de ce sentier contigu.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538859439-sven2

Leeroy Strauss, qui avait voyagé depuis les terres arides du Désert Igöl en quête de réponses, se retrouva ainsi dans une situation extrêmement délicate, en un très court instant. Pris à parti dans l'axe du couperet par un inconnu sanguinaire, porteur d’un message royal, et ayant vraisemblablement fait un détour par Ivreville, le champ des possibles se restreignait considérablement.

Il devait, pour sa vie, se sortir de cette étreinte mortelle qui se refermait sur lui... Cela avait tout d’une situation de crise, mais en y regardant de plus près, de l’espoir jaillissait.

En effet, s’il trouvait le moyen de comprendre, à temps, qu’un éclaireur supersonique était sur le point de le découper par derrière, de faire le lien entre son mandataire et la direction d’où il venait, de parvenir à l’intercepter ou à le rattraper et à l’interroger, le jeune sataniste prendrait une longueur d’avance sur tous les enquêteurs indépendants qui se battaient pour bénéficier des informations royales.

Cependant, ce n’allait pas être une mince affaire. Une fois à distance, Sven était irrattrapable, et sur une accélération de seulement deux pas, il était capable de parcourir un kilomètre, voire plus.

Tout se jouait dans l’instant. Jamais un moment n’avait été aussi opportun que celui-ci, alors que ses jours se comptaient en millième de secondes.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1538780212-separation

À travers les actions, les hommes deviennent des héros. À travers la mort, les héros deviennent des légendes. À travers le temps, les légendes deviennent des mythes. Et c’est en écoutant les mythes que des hommes passent à l’action.

Avancez sans regarder derrière vous. Vous vous rapprochez de la lumière, alors n'ayez pas peur de voir votre ombre grandir...

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler
Revenir en haut Aller en bas
https://gamaran.forumactif.com
Jiwa Lys
Éclaireuse
Éclaireuse
Jiwa Lys


Messages : 7
Date d'inscription : 25/06/2018

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeDim 21 Oct - 18:20

La mission est claire : rechercher le plus grand nombre d’informations afin de comprendre au mieux la situation. Une sorte de course à la montre quoi. Qu’ils peuvent être agaçants les chefs de faction à vouloir toujours tout rapporter à une compétition incessante entre gouvernants. Pour eux, cette quête n’est qu’un prétexte. Qu’importe, moi Jiwa Lys, je compte bien faire tout ce qui est en mon pouvoir pour comprendre ce qu’il s’est passé ce matin-là.


Je m’engage donc dans l’aller conduisant à la zone de soin, comme nous a indiqué notre chef de quête. Le spectacle est horrifiant. Pétrifiant. Des corps, ou plutôt des bouts de corps jonchent le sol au milieu des décombres des maisons. Qu’a-t-il bien pu se passer ce matin pour que la ville soit détruite à ce point… Plus j’avance, plus je vois de corps, dans cette allée qui me semble infinie. Ces pauvres familles ont subi un tournant dans leur vie qu’elles ne pourront jamais effacer de leur mémoire. J’avance d’un pas déterminé, mais au fur et à mesure que je m’approche du camp de soin, mon cœur s’emballe. Et si je retrouvais des membres de ma famille gravement blessés ? Je n’ose même pas baisser les yeux, de peur de me retrouver face à un corps qui me serait familier.

J’arrive enfin au campement de soin, au sud-est de la ville. Plusieurs lignes de ce qui semblent être des lits s’étendent à perte de vue. J’essaie de reprendre mes esprits. Je suis ici pour la quête, il ne faut pas que je l’oublie. Ma mission est d’interroger le plus d’habitants possible et d’ainsi récolter des informations. J’aperçois une femme d’âge mûr qui se tient près d’une couchette dans laquelle un enfant paraît dormir. Je m’approche et lui demande si je peux la questionner. J’ai de la chance, car bien qu’elle ait l’air encore bouleversé, elle accepte de me parler :

- Vous êtes de la faction rigoriste, n’est-ce pas ? J’en fais partie aussi. Je peux vous affirmer que si on m’avait appris à me servir de mon pouvoir, j’aurais pu sauver plusieurs vies pendant cette catastrophe ! Ces conservateurs de rigoristes veulent toujours avoir le dernier mot, et voilà où ça nous mène !

- Je suis de votre avis Madame, je vous le garantis… Mais en premier lieu, pour éviter une nouvelle catastrophe, nous devons essayer de comprendre comment un tel évènement a pu arriver. C’est pourquoi je suis ici. Pourriez-vous me dire Madame, si vous avez ressenti quelque chose de particulier les jours précédents. Une discussion furtivement entendue, un signe météorologique, un sentiment quelconque…

Cette personne n’a finalement pas grand-chose à m’apprendre, si ce n’est qu’elle répète sans cesse que le peuple rigoriste a fait le malheur de sa famille. Encore un problème de factions. Tout évènement est toujours rapporté aux factions. Les pouvoirs commencent donc déjà à semer la pagaille… Tout n’est que prétexte, que façade ! Tout est bon pour guerroyer contre son voisin. Quand est-ce que cela va-t-il enfin cesser ?! Et malheureusement, j’ai le sentiment étrange que la tragédie survenue ce matin a également un lien avec les pouvoirs…

L’avancée de mon enquête n’étant pour le moment pas très concluante, je décide de m’éclipser à l’arrière du campement de soin pour m’assurer qu’il n’y ait aucun de mes proches parmi les blessés. Plus je m’éloigne du centre du camp, plus les cas sont graves et abandonnés à leur sort ! Heureusement, pour l’instant, personne ne m’est familier. Je continue à arpenter le coin, quand j’entends le cri d’un vieillard. Je crois qu’il cherche à m’interpeller. Je m’approche et je le vois sous l’emprise de deux maîtres rigoristes. Il a l’air vraiment mal en point. Encore une méthode rigoriste soi-disant rapide et efficace…qui n’a pourtant pas l’air de porter ses fruits. Je compte faire demi-tour avant que mes supérieurs se demandent ce que je fais là, mais les cris de l’homme s’intensifient. Je ne peux pas le laisser comme ça, entre les mains de ces deux rigoristes qui ont l’air de vouloir résoudre la quête plus par fierté que par humanité. Un peu hésitante tout de même, je me décide à leur parler :

- Messieurs, je me permets de vous interpeller car j’ai l’impression que cet homme vous cause bien des problèmes. Peut-être avez-vous besoin d’aide… Le maltraiter ne fait qu’envenimer la chose. D’ailleurs, ce monsieur n’a pas l’air de vouloir se confier à vous. Je peux essayer à mon tour si vous le souhaiter. D’autre part, notre mission est avant tout d’ordre humanitaire : notre but est d’aider les habitants de la ville et de trouver la cause de cette catastrophe pour ne plus qu’elle se reproduise. Il est donc contraire à notre mission d’user de la violence. De plus, il ne vous donnera aucune information. S’acharner sur lui est donc inutile et cela vous fait perdre votre temps. Pendant que vous interrogerez d’autres habitants, je peux essayer de le questionner avec une méthode différente. Il en va de l’intérêt de la faction rigoriste.

Les deux enquêteurs me dévisagent, laissant de côté le vieillard. J’ai l’impression qu’ils m’examinent. Peut-être ai-je fait un faux pas. Je n’aurais sûrement pas dû me mêler de ça.
Revenir en haut Aller en bas
Oron
Chercheuse
Chercheuse
Oron


Messages : 3
Date d'inscription : 16/06/2018

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeLun 22 Oct - 22:18

« Sommet. Sommet. Sommet. Sommet. Sommetsommetsommet. SOMMET. Sooooommmmmeeeet. S-O-M-M-E-T.»

Le regard embourbé dans la vision de la tour que Shoyo pointait du doigt, Oron continuait d’écouter ses directives. L’émotion qui avait animé le visage de sa supérieure alors lorsqu’elle lui avait expliqué sa tâche avait imprimé en elle le mot qu’elle se répétait inlassablement comme pour en explorer les contours. SOMMET. L’expression presque statuaire d’Oron n’était qu’apparence puisqu’une foule de sensations se déversaient en elle sans qu’elle puisse en dégager du sens. Bien qu’elle éprouvait souvent des difficultés à appréhender les états mentaux de ses congénères, le regard que Shoyo avait plongé dans ses yeux avait propulsé son esprit dans une confusion envoûtante, où les souvenirs encore chauds se mêlent à des sensations qu’elle ne s’était pas encore appropriées. Elle avait souvent vu ce même regard chez les personnes avec qui elle partageait son quotidien lors de son passage au Bandit Trap, et il n’était jamais annonciateur d’un dénouement heureux. Les décombres, encore une fois. Et ces décombres, elle allait devoir les gravir pour mener à bien la mission que Shoyo lui avait donnée. Ses pupilles commençaient à se dilater. Alors que ses viscères étaient traversées par des sensations contradictoires d’ampleur grandissante et que son esprit commençait à se perdre dans un brouillard opaque, la cheffe de la guilde des néo-évolutionnistes donnait un point final à ses ordres.

- SOMMEEEEET !!! cria d’un seul coup la jeune exploratrice tout en se tournant vers Shoyo.

Ce après quoi elle se retourna rapidement et bondit en direction de la tour, sa cape flottant derrière elle et CaresseLe lui emboîtant le pas. Elle s’élançait au milieu des débris et bravait la boue gluante sans aucune hésitation, le regard animé d’une détermination sans pareil. Si les informations persécutantes que son esprit s’était évertué à recouper avaient été près de prendre le dessus, d’autres les avaient balayées en un rien de temps. Effectivement, malgré ses angoisses, Oron avait bien saisi à quel point son initiatrice comptait sur elle et ses capacités. La réussite de sa mission était une condition sine qua non du travail d’archivage de Shoyo, elle avait désormais une grande responsabilité sur les épaules. Rien n’était plus important que cela. C’était un défi pour lequel l’issue se devait d’être positive. Par ailleurs, Oron avait eu suffisamment de temps pour décortiquer l’édifice qu’elle allait devoir escalader et se rendre compte à quel point il était primordial qu’elle se hâte de le faire.

« Pas droit. Manque des murs. Nuages de poussière. Fissures. Ça ruisselle de sable. Des changements de texture pas nets. Ça glisse, ça tombe. Ok. », s’était-elle dit alors que Shoyo lui montrait la ruine.

Avec une agilité certaine, Oron escaladait les murs qui n’avaient plus de mur que le nom, les toitures éparpillées au sol et autres tristes restes témoignant de l’assassinat dont Broadchamber avait été la victime. Un surprenant contraste entre ce paysage macabre et l’entrain de ce petit être progressant presque gracieusement. Comme une personne bègue chez qui les difficultés disparaissent lorsqu’elle se met à chanter, Oron semblait avoir abandonné la démarche étrange qui la caractérise à son habitude. C’est suivie de son fidèle compagnon CaresseLe qu’elle arriva finalement face au bâtiment qu’elle allait devoir maîtriser pour parvenir au sommet et réaliser ses dessins.

« Les pierres ne sont pas alignées comme elles devraient l’être. AH. », pensa-t-elle en se grattant la joue frénétiquement.

En quelques millièmes de seconde, elle passait son regard sur toutes les faces visibles de la tour, ne laissant rien au hasard. Très méthodique, ses capacités perceptives incroyablement fines lui permettaient de déceler les petites fissures, les mouvements au millimètre des blocs de pierre ainsi que les ruissellements de grains sable au milieu de ces derniers. Autant d’informations qui lui étaient très précieuses pour son ascension vers le fameux sommet. Elle dirigea son regard vers ce dernier.

- Accessible seulement par le pan de mur manquant au troisième étage. Manque le mur opposé au deuxième. dit-elle à haute voix comme pour mettre ses idées en place.

Rapidement et toujours avec la même souplesse, elle se dirigea ensuite en direction de l’encadrement d’une fenêtre cassée du bâtiment et y grimpa. Il s’agissait d’une fenêtre du premier étage, accessible sans peine depuis les amoncellements de débris et de boue, ossements restants du rez-de-chaussée. Elle avait fait attention à ne s’appuyer que très légèrement sur l’édifice pour monter sur le cadran de fenêtre afin de ne pas mettre en branle la structure. Elle atterrit sur la terre encore humide parsemée de gravas poussiéreux à l’intérieur du bâtiment. Ses yeux s’écarquillèrent soudainement. Elle avait très bien entendu le grincement des pierres qui se frottent du fait de l’instabilité de la structure. Il s’agissait d’un signe sans appel, le temps lui était compté avant que cette ruine ne soit réduite à la poussière, la laissant sans possibilité d’observer les paysages au derrière sans qu’ils ne soient modifiés par les dégâts. D’autant plus que les planchers des étages étaient manquants. Elle raidit les muscles de son corps d’un coup, prête à se mettre en action.

- CaresseLe, attends-moi au-dehors et garde tes sens en alerte. Tu sais ce qu’il te reste à faire., dit-elle en lui lançant la longue cape qu’elle ne quittait jamais.

Elle sortit un carnet en cuir marron délavé et un petit crayon à papier puis griffonna rapidement dessus, déchira la feuille du carnet et la déposa pliée en deux dans la poche droite de sa cape. Les yeux éclatants et les sourcils froncés, elle dirigea ses pupilles vers ledit sommet.



Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 1540238108-aure


Elle avait décidé d’escalader la structure de pierres instable à la seule force de ses bras et jambes. Effectivement, elle avait jugé plus sûr de n’utiliser aucune technique particulière puisque la tour risquerait de s’effondrer avant qu’elle eut pu y monter suffisamment haut. Et puis, elle souhaitait relever le défi. Cette ascension étant avant tout une course contre la montre, Oron s’élança en direction de l’angle des pans de mur Est et Sud du premier étage. Ayant des possibilités de prises plus rapprochées dans les angles, elle avait opté pour ce terrain. Cela lui permettait de se déplacer plus rapidement et en ayant plus de contrôle sur ses appuis et elle pouvait ainsi grimper jusqu’au début du troisième étage avant de rencontrer le vide. C’est avec une légèreté féline qu’elle déposait ses mains et ses pieds sur les pierres que ses sens lui indiquaient comme étant les plus sûres.

« Grince trop. Poussière. Grondement. Glissante. En biais. Pilier. Fissure. Vibration. », s’enchaînaient les impressions dans sa tête.

Guidée par un instinct sorti de nulle part, elle gravissait les blocs de pierres accumulés. Elle ajustait les mouvements de son souffle en fonction des gestes qu’elle effectuait, de sa position sur la structure et des changements qu’elle percevait sur cette dernière pour gagner en souplesse. Son corps se trouvait ainsi en parfaite homéostasie avec la structure et semblait ne faire qu’un avec elle. Toutefois non sans peine. La sensation rugueuse des blocs de pierre sous ses mains balançait des ondes de frissonnement dans tout son corps, la déstabilisant parfois. Sans compter les tremblements qui perturbaient l’équilibre de son oreille interne à chaque seconde. Mais elle parvenait malgré tout à se ressaisir son objectif étant de se rapprocher au plus près du sommet.

Elle était parvenue jusqu’en haut du deuxième étage et elle constatait désormais que la bâtisse chavirait avec plus d’amplitude. Elle allait devoir traverser jusqu’à l’autre côté de la tour. Il ne s’agissait pas d’une mince affaire : plus elle avançait et moins elle était sûre d’elle, l’instabilité se faisant de plus en plus forte près du haut de la tour. De plus, elle allait se retrouver collée contre la paroi du mur orienté au Sud puisqu’il lui fallait grimper aux restes du pigeonnier, accessibles seulement depuis le mur Ouest. Si cette idée ne l’enchantait guère, elle s’y était préparée et n’était pas prête de reculer. Elle tourna légèrement les pointes de ses pieds et en avança un sur le pan de mur qui la séparait de son but pour ensuite y ramener ses mains. Elle continua ainsi sa route en diagonale en direction du pigeonnier. Si elle semblait avoir la même aisance que lors de son escalade du premier et du deuxième étage, il n’en restait pas moins qu’elle luttait ardemment contre elle-même. Les blocs de pierres sur lesquels elle s’appuyait penchaient de plus en plus et il lui était difficile de garder son équilibre tout en conservant une posture ajustable. Elle hâta le pas, coûte que coûte.

« Pied, main, pied, main, pied, main, pied, main… », se répétait-elle pour garder la cadence, le visage serré et la mine tendue.

Oron se trouvait à présent accrochée dans l’angle opposé à celui par lequel elle était parvenue jusqu’au deuxième étage. Alors que du bout de sa main gauche elle atteignait les restes de toiture qui lui permettraient d’accéder au pigeonnier, son cœur se mit à battre plus fort et son visage se mit en alerte : elle avait senti la tour pencher plus qu’auparavant. Le changement n’aurait pas encore été perceptible pour un individu ne possédant pas ses sens surhumains. Ce sont eux qui lui permirent d’agir vite pour éviter le pire. Elle décrocha alors sa main droite de la pierre à laquelle elle se tenait et la plongea dans sa poche pour en sortir le papier qu’elle avait griffonné en bas de la tour.

« J’ai donc bien fait. »

Et le déchira précipitamment avec ses dents. Des morceaux de papiers sortit un ressort plié et tenu par une ficelle nouée. Sa circonférence était équivalente à celle de son corps et il était d’environs 10 centimètres de hauteur. Elle l’attrapa net de sa main droite tandis que les pierres commençaient à frémir sous ses pieds. Une goutte perlant sur son front, elle balança son bras droit en l’air pour poser le ressort sur l’angle formé par la corniche au sommet de la tour et s’accrocher. L’élan ainsi créé lui permit de se propulser plus aisément en hauteur pour atteindre le sommet de ses deux pieds. Pendant ce temps, l’édifice s’affaissait doucement. Elle s’assit alors sur le ressort qu’elle avait disposé et tira les cordes qui le maintenaient de part et d’autre. Et s’envola.




Elle flottait désormais au-dessus de la tour qui s’effondrait dans un fracas assourdissant. Ses bras, n’étant plus son contrôle, divaguaient lentement au-dessus de sa tête. L’étrange sensation qui parcourait son enveloppe charnelle se traduisait largement sur son visage. Les traits totalement relâchés et le regard perdu dans l’immensité, le petit être paraissait à la fois apaisé et bouleversé. Sa bouche s’entrouvrit et laissa s’échapper un léger soupir, comme de soulagement. Epoustouflant. Elle n’avait jamais eu l’occasion d’avoir un tel point de vue auparavant. Ni de tels frissons dans le corps. Le temps semblait s’être suspendu, dans la lumière éblouissante du soleil.
Bien que transpercée par d’innombrables sensations plus surprenantes les unes que les autres, une partie d’elle-même n’avait pas perdu de vue sa mission première : réaliser une vue panoramique du paysage. Elle avait espéré que le ressort la propulserait plus haut, mais une partie de sa force s’était dispersée dans les pierres qui s’étaient effondrées sous sa poussée. Elle n’avait ainsi pas la possibilité de dessiner, son temps passé en suspens dans le ciel n’étant en réalité que très bref. Mais cela ne posait aucun problème. Les images du spectacle qui s’offrait à elle s’imprimaient tels des instantanés sur sa rétine et elle se trouvait suffisamment haut pour ne pas être trop dérangée par les débris volants de la structure démembrée. Une reproduction parfaite de la réalité qu’elle avait pu observer de son point de vue était ainsi stockée intemporellement dans son esprit, en raison de sa mémoire dite eidétique. D’autant plus que le paysage auquel elle faisait face était saisissant. Des restes humains jonchaient les ruines à perte de vue. Un double massacre : celui des habitants mais aussi celui de la ville. Morte. Certains cadrans du paysage avaient tout de suite frappé Oron, de par leur aspect beaucoup plus désordonné, entremêlé. Ces zones ressortaient au milieu du paysage mortuaire : des couleurs plus assombries, plus de poussière, encore moins de cohérence dans les alignements de débris. Elles étaient les plus à même de n’être seulement que des voiles dissimulant des zones encore inexplorées, peut-être plus édifiantes encore.

« C’est ce que Shoyo cherche sans aucun doute. », s’était-elle dit encore en flottaison.

Il s’agissait de trois zones relativement petites et excentrées par rapport au reste des ruines. Deux d’entre elles étaient plutôt similaires et se trouvaient à l’Est, alors que la dernière était plus reculée au Sud. Il tardait à Oron de les explorer plus en profondeur.

- CARESSELE !!! cria-t-elle alors qu’elle se trouvait en chute libre.

Le ressort l’avait propulsée très légèrement en arrière, suffisamment pour qu’elle n’atterrisse pas au beau milieu des décombres de la tour qu’elle avait escaladée. A son cri, son compagnon de route se gonfla d’un seul coup et sa taille se multiplia par 10 pour former une sorte de gros coussin gonflé d’air. Oron termina sa chute dedans, le visage écrasé contre la peau duveteuse de son animal de compagnie. Elle se releva d’un seul coup et son ami retrouva instantanément sa taille normale. La jeune exploratrice se mit alors en route pour retrouver Shoyo. Elle sortit son carnet marron et son crayon et se mit au travail. Bien qu’elle marchait, elle dessinait dans une concentration intense le paysage qu’elle avait observé lors de son vol alors que les ruines du monstre qu’elle venait tout juste d’affronter étaient encore mouvantes dans son dos.  
Revenir en haut Aller en bas
Leeroy Strauss
Guerrier fanatique
Guerrier fanatique
Leeroy Strauss


Messages : 6
Date d'inscription : 16/06/2018

Statistiques du personnage
Nature du pouvoir: Hell Blaze
Nature de la maîtrise: XXX
Inventaire:

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitimeMer 24 Oct - 18:49


Ma mésaventure matinale et les sermons de Sheitan s'évanouissent derrière mon dos à mesure que je m'éloigne de la cité dépravée d'Ivreville. J'avance au travers du désert en réprimant quelques jurons. Bien que je m'y sois acclimaté, je n'ai toujours pas adopté cette région comme nouveau chez-moi. Enveloppé d'une cape qui me protège des courants d'air sec empli de grains de sable me fouettant la peau, j'avance pas à pas avec un rythme effréné, mes traces de pas étant très rapidement soufflées par le vent. En une heure seulement, me voici aux abords du Bandit Trap. Le lieu est tout aussi grossier que l'image que je m'en fais. Deux immenses collines, scindées par une gigantesque tranchée de cinq mètres de haut, unique alternative pour traverser cette chaîne montagneuse autrement qu'en escaladant ou en empruntant le Col de l'Utherüss. Ceux qui connaissent cet endroit connaissent généralement sa réputation, et préfèrent éviter d'y passer à tout prix. En effet, le Tunnel du Rhektüm, qui n'est pourtant pas vraiment un tunnel, n'est pas surnommé le Bandit Trap pour rien. Nombre de renégats ou fugitifs ont élu domicile dans les environs, se cachant dans les montagnes où la nourriture est rare et vivant du pillage des malheureux passants. Lors de mon dernier passage du Sud au Nord, je me suis fait attaqué à plusieurs reprises. Par chance, ces brigands ne faisaient absolument pas le poids contre moi. Même à plusieurs. Conscient des risques, je m'avançais aux aguets, mais avec assurance. Pas moyen qu'ils ne me prennent pas surprise. Aujourd'hui, c'est avec le même état d'esprit que j'entame le chemin du retour.


Je pénètre donc dans ce gigantesque couloir, le long de la paroi droite. Je m'arrête un instant afin d'inspecter l'environnement. En tapotant du doigt comme j'aurais toqué à une porte, je tâte à différents endroits, comprenant qu'il s'agit de roche tout ce qu'il y a de plus commun. Le sol quant à lui, est recouvert d'une mélasse boueuse, gorgée de sable lors des premiers mètres. Le passage est relativement large, mais la longueur ne permet pas de discerner une quelconque fin. On s'y sent donc peu à peu à l'étroit à mesure que l'on s'y enfonce. Si on repense au fait que des bandits peuvent surgir à tout moment, le Rhektüm devient vraiment un endroit terrifiant. Je ferais mieux de me dépêcher.

À défaut d'avoir un horizon dans ce long sillon, le chemin m'est tout tracé et je peux avancer sans que le sol ne se dérobe sous mes pieds. En cinq minutes seulement, en courant à une cadence enjouée mais peu épuisante, j'ai déjà franchi l'un des cinq kilomètres du tunnel. La traversée est plutôt tranquille jusqu'ici. Tout à coup, une infime variation vient perturber la monotonie des bruits de mes pas, de mon souffle, et autres bruits relatifs à ma course. Un léger grondement, que je ne remarque pas dans l'immédiat, mais qui se répète, à l'instar de mes propres pas. Arquant un sourcil, je me stoppe net, tournant la tête légèrement sur le côté afin d'avoir les oreilles orientées vers les deux directions de la tranchée. Je ressens alors avec certitude qu'on approche à grande vitesse. Le sol délivre quelques vibrations qui s'ajoutent à ma théorie. Je me tourne donc en direction de l'entrée du tunnel par laquelle j'étais moi-même passé quelques instants auparavant. Je vois alors avec stupeur qu'un homme court à une vitesse hallucinante vers moi. Sans plus attendre, je me mets en position. Les frissons qui parcourent ma peau et l'adrénaline que je sens se déverser dans mes entrailles témoignent à quel point je me sens en situation dangereuse. Instinct de survie ou sixième sens ? Quoi qu'il en soit, à l'approche de mon hypothétique assaillant, je vois une lame tendue. Je m'abaisse alors aussi vite que possible, laissant l'arme passer juste au-dessus de ma tête, tailladant quelques mèches au passage. Il s'agissait donc réellement d'un ennemi.

⸺ Au nom de la couronne… DÉGAGE !

Tout s'est passé très rapidement. Les mots de mon agresseur se terminent à l'instant même où il m'a donné son coup. Terminant son geste après avoir manqué sa cible, le messager royal se heurt alors à mon corps, resté en opposition. En effet, en m'abaissant, je vins reculer la jambe droite afin de me mettre de profil. C'est alors que je mis les bras et l'épaule en avant afin d'encaisser notre collision, m'abaissant sur mes appuis afin d'assurer un bon amorti. Sven se plaque donc en plein diaphragme contre mon épaule, me faisant glisser sur quelques mètres tandis que mes pieds raclent la boue qui jonche le sol par endroit. Profitant sans perdre un instant de ma position, je bascule légèrement en arrière afin de jouer sur le centre de gravité de mon assaillant en le soulevant légèrement du sol avant de pousser sur mes jambes vers le haut, repoussant Sven le plus haut possible tandis qu'il est encore plaqué contre mon épaule. La gouverne visait à convertir sa propre vitesse en force de propulsion vers les airs, notre position au centre du couloir vis-à-vis des parois l'empêchant de prendre appui contre lors de sa propulsion verticale. En quelques instants, il se retrouve donc au-dessus de la tranchée, montant, se stabilisant, avant de redescendre.


Durant ces quelques secondes, alors que Sven découvre les joies d'être un oiseau, le temps semble se dilater pour moi. Un flot continu de pensées me submerge sans que je n'aie à les guider de quelque manière que ce soi. Je suis comme témoin de mes propres songes, n'ayant qu'à écouter ce qu'une machine intérieure déduit de la situation pour moi. « Au nom de la Couronne », a-t-il dit. Mais qu'est ce qu'un homme du roi viendrait faire ici ? Quelque chose me turlupine. Sa présence signifie forcément que le roi et un groupe présent au nord du Bandit Trap communiquent. S'agirait-il des satanistes ? Trop de coïncidences me sautent au visage le même jour pour ne pas être liées d'une quelconque façon. Le fait qu'un homme du roi revienne d'Ivreville ne présage rien de bon, surtout en l'état actuel des choses. Mon petit doigt me dit qu'il y a peut-être quelque chose à tirer de ce gars-là... Mais comment lui soutirer les informations dont j'ai besoin ? Mise à part la manière forte... Pas le choix, il faut que je le chope.


Le temps reprend son cours à mesure que Sven accélère durant sa chute. La main droite sur le pommeau de mon sabre que je porte à la taille, je compte attendre que mon adversaire retombe assez bas pour le charger. Après un bref soupir, je relâche finalement l'étreinte sur mon arme en amenant ma main gauche à mon épaule opposée. J'agrippe le bandage qui recouvre mon bras afin de le desserrer, dévoilant par la même occasion une marque noire qui se dessine sur mon épiderme et qui semble s'agiter sous les bandes, comme une bête sauvage qui n'aurait pas vu la lumière du jour depuis bien trop longtemps. Des râles rauques résonnent à travers le tunnel, défiant toute personne aux alentours d'approcher. Cette marque est sans aucun doute la manifestation d'un pouvoir, mais lequel est-ce ? D'un coup sec, je termine de retirer mon bandage, une matière noire recouvrant entièrement mon bras désormais. Celle-ci se déchaîne dans tous les sens à l'instar d'un grand feu, les bruits étouffés jusque-là devenant clairs à identifier comme des crépitements provenant de cette étrange matière. Et d'un coup de poing dirigé vers Sven, encore en chute libre, qui passait enfin entre les deux parois de la tranchée, je dirigeais cette énorme chose qui prit la forme d'un dragon noir aux crocs acérés. Suivant une courbe aléatoire, comme si l'animal était doté de sa propre volonté, le dragon vint empaler sa mâchoire sur mon ennemi tel un oiseau becterait un pauvre insecte.

Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. 5A4

Les dégâts allaient se faire sentir si Sven encaissait cette attaque de plein fouet. Après avoir violemment heurté son corps et brusqué sa chute, l'étreignant dans une mâchoire de fer, le dragon s'écrase alors contre le sol afin de l'y encastrer violemment, soulevant un grand nuage de poussière. Haletant, je me tiens le bras droit, endolori, en réprimant un rictus de douleur. L'usage de mon pouvoir est très épuisant et je risque gros en l'utilisant. Toutefois, l'ouverture était quasiment parfaite, mon dragon ayant la possibilité de réagir de lui-même si l'adversaire tentait une esquive ; Sven était sans doute l'homme le plus rapide que je n'ai jamais vu, mais dans les airs, il ne pouvait qu'attendre de redescendre, impuissant. De plus, il semble détenir des informations qui pourraient mériter un tel sacrifice d'énergie. Le dragon réduit sa taille petit à petit malgré qu'il tienne toujours Sven contre le sol, me permettant ainsi d'économiser quelques forces. J'espère ne pas l'avoir tué sur le coup, ayant déployé la force presque totale de mon dragon, bien que cela me paraîtrait surprenant. Il est temps de passer aux questions...

Je l'approche avec précaution, même si je suis en position de force : on n'est jamais trop prudent. Je me montre à lui avec un regard glacial et un visage fermé au possible. Bien que je sois très humain, je sais également faire preuve d'une atrocité sans pareille lorsque je n'ai pas le choix. Et nous sommes justement dans ce genre de situation.

⸺ Je ne vais pas passer par quatre chemins, alors... Dis-moi ce que tu faisais à Ivreville, ainsi que tout ce que tu sais à propos de Broadchamber. Sinon...

Ma main gauche vient se caler au niveau de ma gorge, mimant une décapitation. Bien entendu, je n'ai aucunement l'intention de l'éliminer, du moins, pas avant qu'il ne m'ait donné les informations dont j'ai besoin. Et puis pour ce qui est de la suite, je risque de ne pas avoir le choix que de l'éliminer... Pour ma propre survie. Je ne pourrai malheureusement pas cacher son corps, je risque de devoir laisser Malakaï le dépecer...
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Empty
MessageSujet: Re: Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.   Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler. Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
Ce que le ciel n'a pas voulu dévoiler.
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Gamaran :: Zone RP :: Terres hospitalières :: Petites cités-
Sauter vers: